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<blockquote>Les chinois font avec les européens un commerce de cinquante millions. Les deux cinquièmes sont soldés* par la France en argent, le reste en draps anglais, en kaolin (argile blanche), en coton de Surate ou de Bengale, en opium de Patna, en bois de santal, et en poivre de la côte de Malabar. [...] On ne rapporte en échange de toutes ces richesses, que du thé vert ou noir, avec quelques caisses de soie écrue pour les manufactures européennes ; car je compte pour rien les porcelaines qui lestent les vaisseaux, et les étoffes de soie qui ne procurent presque aucun bénéfice. | <blockquote>Les chinois font avec les européens un commerce de cinquante millions. Les deux cinquièmes sont soldés* par la France en argent, le reste en draps anglais, en kaolin (argile blanche), en coton de Surate ou de Bengale, en opium de Patna, en bois de santal, et en poivre de la côte de Malabar. [...] On ne rapporte en échange de toutes ces richesses, que du thé vert ou noir, avec quelques caisses de soie écrue pour les manufactures européennes ; car je compte pour rien les porcelaines qui lestent les vaisseaux, et les étoffes de soie qui ne procurent presque aucun bénéfice. | ||
Aucune nation ne fait certainement un commerce aussi avantageux avec les étrangers que la Chine, et il n'en est point cependant qui impose des conditions aussi dures, \[...\] : il ne se boit pas une tasse de thé en Europe qui n'ait coûté une humiliation à ceux qui l'ont acheté à Canton, qui l'ont embarqué, et ont sillonné la moitié du globe pour apporter cette feuille dans nos marchés.</blockquote> | Aucune nation ne fait certainement un commerce aussi avantageux avec les étrangers que la Chine, et il n'en est point cependant qui impose des conditions aussi dures, \[...\] : il ne se boit pas une tasse de thé en Europe qui n'ait coûté une humiliation à ceux qui l'ont acheté à Canton, qui l'ont embarqué, et ont sillonné la moitié du globe pour apporter cette feuille dans nos marchés.</blockquote> | ||
''Source : Journal de bord de J.-F. de Lapérouse : Escale à Macao, du 3 janvier au 5 février 1787 -\* \*Un voyage de découvertes au siècle des Lumières'' | |||
''* <u>Soldé</u> = payé'' | ''* <u>Soldé</u> = payé'' | ||
== Echange avec les indiens == | |||
<blockquote>Les Indiens des villages de cette partie de l'île s'empressèrent de venir à bord dans leurs pirogues, apportant, pour commercer avec nous, quelques cochons, des patates, des bananes, des racines \[...\], avec des étoffes et quelques autres curiosités faisant partie de leur costume. Je ne voulus leur permettre de monter à bord que lorsque la frégate fut mouillée et que les voiles furent serrées. \[…\] Nos morceaux de vieux cercles de fer excitaient infiniment leurs désirs ; ils ne manquaient pas d'adresse pour s'en procurer, en faisant bien leurs marchés ; jamais ils n'auraient vendu en bloc une quantité d'étoffes ou plusieurs cochons ; ils savaient très bien qu'il y aurait plus de profit pour eux à convenir d'un prix particulier pour chaque article. Cette habitude du commerce, cette connaissance du fer qu'ils ne doivent pas aux anglais, d'après leur aveu, sont de nouvelles preuves de la fréquentation que ces peuples ont eue anciennement avec les Espagnols.</blockquote> | |||
''Source : Journal de bord de J.-F. de Lapérouse : Arrivée aux îles Sandwich (ancien nom des îles Hawaï), le 29 mai 1786 - Un voyage de découvertes au siècle des Lumières''. | |||
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== | == Escale sur l'île de Pâques (du 9 au 10 avril 1786) == | ||
<blockquote>Nous n’avons abordé dans leur île que pour faire du bien ; nous les avons comblés de présents \[...\] semé leurs champs \[...\] laissé cochons, chèvres et brebis ; néanmoins, ils nous ont jeté des pierres et nous ont volé tout ce qu’il leur a été possible d’enlever. | <blockquote>Nous n’avons abordé dans leur île que pour faire du bien ; nous les avons comblés de présents \[...\] semé leurs champs \[...\] laissé cochons, chèvres et brebis ; néanmoins, ils nous ont jeté des pierres et nous ont volé tout ce qu’il leur a été possible d’enlever. | ||
Nous savions déjà que les Indiens étaient très voleurs ; mais nous ne leur supposions pas une activité et une opiniâtreté capables d’exécuter les projets les plus longs et les plus difficiles ; nous apprîmes bientôt à les mieux connaître. Ils passaient toutes les nuits à épier le moment favorable pour nous voler ; mais nous faisions bonne garde à bord de nos vaisseaux, et ils ont rarement trompé notre vigilance. \[…\]</blockquote>''Source : | Nous savions déjà que les Indiens étaient très voleurs ; mais nous ne leur supposions pas une activité et une opiniâtreté capables d’exécuter les projets les plus longs et les plus difficiles ; nous apprîmes bientôt à les mieux connaître. Ils passaient toutes les nuits à épier le moment favorable pour nous voler ; mais nous faisions bonne garde à bord de nos vaisseaux, et ils ont rarement trompé notre vigilance. \[…\] | ||
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''Source : Un voyage de découverte au siècle des Lumières - Musée national de la marine'' | |||
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''Source : Insulaires et monuments de l'îles de Pâques par Duché de Vancy - 1785.'' | ''Source : Insulaires et monuments de l'îles de Pâques par Duché de Vancy - 1785.'' | ||
== | == Désillusions == | ||
<blockquote>Nous savions déjà que les Indiens étaient très voleurs ; mais nous ne leur supposions pas une activité et une opiniâtreté capables d’exécuter les projets les plus longs et les plus difficiles ; nous apprîmes bientôt à les mieux connaître. Ils passaient toutes les nuits à épier le moment favorable pour nous voler ; mais nous faisions bonne garde à bord de nos vaisseaux, et ils ont rarement trompé notre vigilance. […] Je ne craindrais pas d'annoncer que cette peuplade s'anéantirait entièrement, si, à tous ces vices destructeurs, elle joignait le malheur de connaître l'usage de quelque liqueur enivrante. Les philosophes se récrieraient en vain contre ce tableau. Ils font leurs livres au coin de leur feu, et je voyage depuis trente ans : je suis témoin des injustices et de la fourberie de ces peuples qu'on nous peint si bons, parce qu'ils sont très près de la nature ; mais cette nature n'est sublime que dans ses masses ; elle néglige tous les détails. Il est impossible de pénétrer dans les bois que la main des hommes civilisés n'a point élagués ; de traverser les plaines remplies de pierres, de rochers, et inondées de marais impraticables ; de faire société enfin avec l'homme de la nature, parce qu'il est barbare, méchant et fourbe. […]</blockquote> | |||
''Source : Un voyage de découverte au siècle des Lumières - Musée national de la marine'' | |||
== Massacre de Tutuila == | |||
[[Fichier:Massacre de Fleurieu.jpg|500px|centré]] | [[Fichier:Massacre de Fleurieu.jpg|500px|centré]] | ||
Le 6 Décembre, les Français mouillent devant l’île de Tutuila, appelée alors Maouna par Lapérouse (actuellement dans l'Archipel des Samoa américaines). | Le 6 Décembre, les Français mouillent devant l’île de Tutuila, appelée alors Maouna par Lapérouse (actuellement dans l'Archipel des Samoa américaines). | ||
== Questionnaire == | |||
Image avec un aperçu en surbrillance pour chaque question. Utilisez les aides permettant de répondre aux questions 8, 9 et 10 du formulaire : | |||
[[Fichier:Etape4 massacre.png|vignette]] | [[Fichier:Etape4 massacre.png|vignette]] | ||
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{| class="wikitable" | {| class="wikitable" | ||
|Question 8 :Que se passe-t-il ? Décris la scène.Aide : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Fleuriot_de_Langle | |Question 8 :Que se passe-t-il ? Décris la scène.Aide : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Fleuriot_de_Langle | ||
Question 9 :Combien de marins de l'expédition trouvèrent-ils la mort à cette occasion ? Aide : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tutuila | Question 9 :Combien de marins de l'expédition trouvèrent-ils la mort à cette occasion ? Aide : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tutuila | ||
Question 10 :Aux abords de quelle île a eu lieu ce massacre ? Aide : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tutuila | Question 10 :Aux abords de quelle île a eu lieu ce massacre ? Aide : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tutuila | ||
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''Source : Le voyage de Lapérouse par Robert Dumas - Académie des Sciences et Lettres de Montpellier'' | ''Source : Le voyage de Lapérouse par Robert Dumas - Académie des Sciences et Lettres de Montpellier'' | ||
== | == Le mythe du "bon sauvage" == | ||
Les Européens, en arrivant sur d’immenses caravelles, possédant des armes à poudre ainsi que des chevaux, ont fortement intrigué ou impressionné les autochtones, plaçant les explorateurs et leur équipage dans une position de supériorité. Originellement le « bon sauvage » est donc un terme assez péjoratif, réduisant ces tribus à des sauvages ignorants et benêts, vivant sans ordre ni codes sociaux et n’étant pas vraiment humains. | Les Européens, en arrivant sur d’immenses caravelles, possédant des armes à poudre ainsi que des chevaux, ont fortement intrigué ou impressionné les autochtones, plaçant les explorateurs et leur équipage dans une position de supériorité. Originellement le « bon sauvage » est donc un terme assez péjoratif, réduisant ces tribus à des sauvages ignorants et benêts, vivant sans ordre ni codes sociaux et n’étant pas vraiment humains. | ||
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''Source : Projet Lapérouse - Centre universitaire Jean-François Champollion'' | ''Source : Projet Lapérouse - Centre universitaire Jean-François Champollion'' | ||
== | == Journal de bord de J.-F. de Lapérouse : Après le massacre de Tutuila (Samoa), le 11 décembre 1787 == | ||
Mon opinion sur les peuples incivilisés était fixée depuis longtemps ; mon voyage n’a pu que m’y affermir : J’ai trop, à mes périls, appris à les connaître. Je suis cependant mille fois plus en colère contre les philosophes qui exaltent tant les sauvages, que contre les sauvages eux-mêmes. Ce malheureux Lamanon, qu’ils ont massacré, me disait la veille de sa mort, que ces hommes valaient mieux que nous. Rigide observateur des ordres consignés dans mes instructions, j’ai toujours usé avec eux de la plus grande modération ; mais je vous avoue que si je devais faire une nouvelle campagne de ce genre, je demanderais d’autres ordres. Un navigateur, en quittant l’Europe, doit considérer les sauvages comme des ennemis, très faibles à la vérité, qu’il serait peu généreux d’attaquer sans motif, qu’il serait barbare de détruire, mais qu’on a le droit de prévenir lorsqu’on y est autorisé par de justes soupçons. | Mon opinion sur les peuples incivilisés était fixée depuis longtemps ; mon voyage n’a pu que m’y affermir : J’ai trop, à mes périls, appris à les connaître. Je suis cependant mille fois plus en colère contre les philosophes qui exaltent tant les sauvages, que contre les sauvages eux-mêmes. Ce malheureux Lamanon, qu’ils ont massacré, me disait la veille de sa mort, que ces hommes valaient mieux que nous. Rigide observateur des ordres consignés dans mes instructions, j’ai toujours usé avec eux de la plus grande modération ; mais je vous avoue que si je devais faire une nouvelle campagne de ce genre, je demanderais d’autres ordres. Un navigateur, en quittant l’Europe, doit considérer les sauvages comme des ennemis, très faibles à la vérité, qu’il serait peu généreux d’attaquer sans motif, qu’il serait barbare de détruire, mais qu’on a le droit de prévenir lorsqu’on y est autorisé par de justes soupçons. | ||
''Source : Un voyage de découverte au siècle des Lumières - Musée national de la marine'' | ''Source : Un voyage de découverte au siècle des Lumières - Musée national de la marine'' | ||