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Le commerce avec la Chine (publié le 26/05/2014)
== Le commerce avec la Chine ==


Les chinois font avec les européens un commerce de cinquante millions. Les deux cinquièmes sont soldés\* par la France en argent, le reste en draps anglais, en kaolin (argile blanche), en coton de Surate ou de Bengale, en opium de Patna, en bois de santal, et  en poivre de la côte de Malabar.
Les chinois font avec les européens un commerce de cinquante millions. Les deux cinquièmes sont soldés\* par la France en argent, le reste en draps anglais, en kaolin (argile blanche), en coton de Surate ou de Bengale, en opium de Patna, en bois de santal, et  en poivre de la côte de Malabar.
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Echange avec les indiens
== Echange avec les indiens ==


Les Indiens des villages de cette partie de l'île s'empressèrent de venir à bord dans leurs pirogues, apportant, pour commercer avec nous, quelques cochons, des patates, des bananes, des racines \[...\], avec des étoffes et quelques autres curiosités faisant partie de leur costume. Je ne voulus leur permettre de monter à bord que lorsque la frégate fut mouillée et que les voiles furent serrées. \[…\] Nos morceaux de vieux cercles de fer excitaient infiniment leurs désirs ; ils ne manquaient pas d'adresse pour s'en procurer, en faisant bien leurs marchés ; jamais ils n'auraient vendu en bloc une quantité d'étoffes ou plusieurs cochons ; ils savaient très bien qu'il y aurait plus de profit pour eux à convenir d'un prix particulier pour chaque article. Cette habitude du commerce, cette connaissance du fer qu'ils ne doivent pas aux anglais, d'après leur aveu, sont de nouvelles preuves de la fréquentation que ces peuples ont eue anciennement avec les Espagnols.
Les Indiens des villages de cette partie de l'île s'empressèrent de venir à bord dans leurs pirogues, apportant, pour commercer avec nous, quelques cochons, des patates, des bananes, des racines \[...\], avec des étoffes et quelques autres curiosités faisant partie de leur costume. Je ne voulus leur permettre de monter à bord que lorsque la frégate fut mouillée et que les voiles furent serrées. \[…\] Nos morceaux de vieux cercles de fer excitaient infiniment leurs désirs ; ils ne manquaient pas d'adresse pour s'en procurer, en faisant bien leurs marchés ; jamais ils n'auraient vendu en bloc une quantité d'étoffes ou plusieurs cochons ; ils savaient très bien qu'il y aurait plus de profit pour eux à convenir d'un prix particulier pour chaque article. Cette habitude du commerce, cette connaissance du fer qu'ils ne doivent pas aux anglais, d'après leur aveu, sont de nouvelles preuves de la fréquentation que ces peuples ont eue anciennement avec les Espagnols.
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Journal de bord de J.-F. de Lapérouse : Escale à Port-des-Français (Alaska), du 3 au 30 juillet 1786
== Journal de bord de J.-F. de Lapérouse : Escale à Port-des-Français (Alaska), du 3 au 30 juillet 1786 ==


Nous savions déjà que les Indiens étaient très voleurs ; mais nous ne leur supposions pas une activité et une opiniâtreté capables d’exécuter les projets les plus longs et les plus difficiles ; nous apprîmes bientôt à les mieux connaître. Ils passaient toutes les nuits à épier le moment favorable pour nous voler ; mais nous faisions bonne garde à bord de nos vaisseaux, et ils ont rarement trompé notre vigilance. \[…\] Je ne craindrais pas d'annoncer que cette peuplade s'anéantirait entièrement, si, à tous ces vices destructeurs, elle joignait le malheur de connaître l'usage de quelque liqueur enivrante. Les philosophes se récrieraient en vain contre ce tableau. Ils font leurs livres au coin de leur feu, et je voyage depuis trente ans : je suis témoin des injustices et de la fourberie de ces peuples qu'on nous peint si bons, parce qu'ils sont très près de la nature ; mais cette nature n'est sublime que dans ses masses ; elle néglige tous les détails. Il est impossible de pénétrer dans les bois que la main des hommes civilisés n'a point élagués ; de traverser les plaines remplies de pierres, de rochers, et inondées de marais impraticables ; de faire société enfin avec l'homme de la nature, parce qu'il est barbare, méchant et fourbe. \[…\]
Nous savions déjà que les Indiens étaient très voleurs ; mais nous ne leur supposions pas une activité et une opiniâtreté capables d’exécuter les projets les plus longs et les plus difficiles ; nous apprîmes bientôt à les mieux connaître. Ils passaient toutes les nuits à épier le moment favorable pour nous voler ; mais nous faisions bonne garde à bord de nos vaisseaux, et ils ont rarement trompé notre vigilance. \[…\] Je ne craindrais pas d'annoncer que cette peuplade s'anéantirait entièrement, si, à tous ces vices destructeurs, elle joignait le malheur de connaître l'usage de quelque liqueur enivrante. Les philosophes se récrieraient en vain contre ce tableau. Ils font leurs livres au coin de leur feu, et je voyage depuis trente ans : je suis témoin des injustices et de la fourberie de ces peuples qu'on nous peint si bons, parce qu'ils sont très près de la nature ; mais cette nature n'est sublime que dans ses masses ; elle néglige tous les détails. Il est impossible de pénétrer dans les bois que la main des hommes civilisés n'a point élagués ; de traverser les plaines remplies de pierres, de rochers, et inondées de marais impraticables ; de faire société enfin avec l'homme de la nature, parce qu'il est barbare, méchant et fourbe. \[…\]